Internet : gare à l’intox !

Internet : gare à l’intox !

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Le numérique est aujourd’hui une des principales sources d’accès à l’information. Ainsi, il ressort du '33e Baromètre de confiance dans les médias' réalisé par Kantar pour « La Croix »  que les deux médias les plus sollicités par les français pour l’accès à l’information sont : la télévision (48 %) et Internet (32 % et 75% par les jeunes). Or, ces deux canaux sont paradoxalement jugés par les sondés comme les moins crédibles. Et il est vrai que si le numérique et les réseaux sociaux sont un outil formidable pour l’échange d’informations et de connaissances, ils sont aussi par leur dimension tentaculaire un terreau favorable à l’intox. Le contexte actuel de pandémie a d’ailleurs mis en exergue l’instrumentalisation qui pouvait être faite d’une crise en jouant sur les peurs et l’exacerbation des émotions.

Comment l'intox se manifeste-t-elle de nos jours ? Sous quelles formes? Quels sont ses objectifs et comment s’en prémunir ? Creusons un peu.

 

L’intox, une technique de désinformation ancienne 

L’expression « intox » est entrée dans le langage familier au début des années 90, par le biais de la rubrique « info, intox ? » de l’émission « double jeu » de France 2. Il s’agit d’une action insidieuse, dont l’objectif est de diffuser une information fausse, partisane, mensongère ou non vérifiée. L’intox a d’abord été utilisée à des fins militaires et politiques. Déjà décrites par le général chinois Sun Tzu dans son traité l’Art de la guerre au IVe siècle av. J.C., les techniques de la désinformation ont été systématisées au XXème siècle avec l’émergence des médias de masse et d’une véritable opinion publique. Cette arme virtuelle a beaucoup été utilisée sous la forme de propagande, notamment au cours de la deuxième guerre mondiale et par l’union Soviétique dans le cadre de la guerre froide. 

L’apparition du numérique a fortement bouleversé le paysage médiatique.  La multiplication des plateformes sur Internet avec une participation active de ses utilisateurs favorise la circulation des intox. Si la diffusion d’informations fallacieuses peut être due à une erreur, elle est souvent intentionnelle et revêt alors un caractère malveillant. Les motivations d’une intox peuvent être financières (revenus publicitaires calculés aux clics par exemple), idéologiques (convaincre, emporter l’adhésion à ses opinions), ou psychologiques (le besoin de faire le buzz, ou d’être malintentionné).

 

Quelles formes revêt l’intox ? 

On retiendra parmi les principales :

- les « théories du complot ». Pierre-André Taguieff, sociologue français et spécialiste de la question, affirme que « la pensée complotiste se fonde sur un postulat : tout ce qui arrive a été voulu par des puissances invisibles ». Il identifie quatre grands principes qui permettent d’identifier les croyances conspirationnistes : Rien n’arrive par accident ; Tout ce qui arrive est le résultat d’intentions ou de volontés cachées ; Rien n’est tel qu’il parait être ; Tout est lié, mais de façon occulte. Le complotisme est aussi directement lié à la mondialisation, perçue parfois comme une force obscure dont on ne maitrise pas et comprend mal les mécanismes.

- Le canular : Il peut avoir une portée divertissante avec l’intention unique et claire de faire rire mais peut aussi être hostile. On l’appellera alors « hoax » ou « cyber rumeur ». Le but est d’utiliser Internet pour propager à grande échelle, sous forme de courriels, ou de messages publiés sur les réseaux sociaux ou les forums, des informations erronées ou invérifiables. Il faut faire en sorte que l’information ait un impact important pour que l'internaute la relaie à son entourage : cela peut être l’existence d'un nouveau virus informatique redoutable, d’une vidéo émouvante, d’une petite fille atteinte d’un cancer par exemple, d’un scandale financier... Le « hoax » peut conduire à la désinformation généralisée ou mettre à mal la réputation d’une personne ou d’une institution. Le message peut même viser à extorquer de l’argent ou mettre la main sur des données personnelles sensibles.

- La « fake news » ou infox est comme le hoax, une fausse nouvelle mais qui a l’air vraie car elle utilise les codes traditionnels du journalisme.

- La falsification d’images : les images ont une charge émotionnelle particulièrement forte. Il arrive souvent que des photos soient détournées ou truquées pour illustrer une intox.  Elles sont alors complètement sorties de leur contexte.

 

Comment démêler le vrai du faux ?

Une des premières résolutions à prendre pour faire face aux intox est de développer son esprit critique en raisonnant de manière rationnelle, sans être ni trop rigide, ni trop naïf. Face à la prolifération des fausses informations, les chercheurs  Nicolas Gauvrit et Sylvain Delouvée conseillent d’ « adopter deux principes clés : d’une part, savoir douter de soi-même ; d’autre part, essayer de trouver des contre-exemples ». Il semble aussi important de bien réfléchir avant de faire suivre des informations trouvées sur les réseaux sociaux : essayer d’abord de remonter à la source. Le fameux « j’ai lu sur facebook que… » ne semble pas très prudent. Se méfier des sources anonymes est un point essentiel. Enfin, il existe aujourd’hui une nouvelle sorte de travail d’investigation réalisé par les journalistes : le « fast checking » qui consiste à vérifier la véracité des faits et l’exactitude des déclarations reléguées dans les médias. C’est une pratique dorénavant institutionnalisée, qui est intégré aux cursus d’études en journalisme. Les principaux quotidiens nationaux proposent au grand public une rubrique permettant de contrôler la véracité d’une information.

Quels canaux utilisez-vous principalement pour l’accès à l’information ?  Quel traitement de l’information faites-vous ? Êtes-vous sensible à cette question de la désinformation ?

Vos témoignages nous intéressent !

 

Photo © Adobe – Auteur : Rawpixel.com

charlotte4575, 04/02/2020