Comprendre l’égocentrisme

Comprendre l’égocentrisme

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Il vous est sans doute déjà arrivé de discuter avec une personne et d’avoir la désagréable impression d’assister à un monologue, tant elle ramène sans cesse la conversation à elle, à sa propre expérience. Ou avez-vous peut-être même été en couple avec un individu de ce type, c’est à dire égocentrique. Dans ce cas, vous savez à quel point la relation, souvent à sens unique peut devenir décourageante et épuisante émotionnellement. Mais comment définir l’égocentrisme ? Comment ce trait de caractère émerge-t-il ? Quel impact a-t-il sur l’entourage ? Comment en prendre conscience et s’améliorer ? Creusons un peu …    

 

Qu’est-ce qu’une personne égocentrique ?

L’étymologie ne serait-être plus claire. Le mot égocentrisme vient du latin « Ego » qui signifie « moi » et « Centrum », « centre ». Nous pouvons donc le définir littéralement ainsi : « centré sur soi ». L’égocentrisme, à ne pas confondre avec le narcissisme qui est une pathologie, est plutôt une caractéristique de la personnalité d’un individu. Une personne égocentrique a tendance à tout ramener à elle. On la reconnait à sa capacité à monopoliser une conversation en rebondissant dès que possible sur une anecdote pour faire le lien avec son propre vécu. Elle ne s’intéresse pas aux autres et croit qu’ils pensent forcément comme elle. Elle considère ses opinions et comportements comme seuls valables. Elle voit d’autre part le monde à travers le prisme de ses propres intérêts et ne montre que peu d’empathie pour son prochain. L’égocentrique est très dépendant du regard de l’autre et des compliments qu’on lui adresse car paradoxalement, ce « culte du soi » traduit souvent une faible estime de sa propre personne.

 

D’où vient ce besoin d’être au centre du monde ?

« Nous avons tous un besoin grégaire d’exister dans le regard de l’autre », explique la médecin psychiatre Dr Christine Barois. « Quelqu’un de « tout seul », cela n’existe pas. Mais ceux qui ne sont pas en sécurité avec eux-mêmes peuvent aller jusqu’à se mettre en spectacle pour se sentir exister ». Et c’est souvent une blessure d’abandon qui remonte à l’enfance qui explique ce besoin permanent d’attention et de reconnaissance. Lorsque les besoins affectifs n’ont pas été assouvis, qu’un déficit d’amour a prévalu. Cela est encore plus fréquent chez les personnes ayant été victimes jeunes d’un traumatisme psychique grave : abus sexuel, violences physiques, décès brutal d’un très proche … Le besoin de compenser en se mettant constamment en avant pour se sentir aimé est une réaction classique. Cependant, le contraire peut aussi faire surgir une personnalité égocentrique. Un enfant trop choyé, toujours au centre de l’attention à qui l’on met peu de limites et qu’on abreuve de compliments aura par la suite du mal à s’effacer pour laisser l’autre exister.

 

Une particularité difficile à vivre pour l’entourage

L’égocentrisme est un trait typique de l’enfance qui atteint son paroxysme entre 3 et 7 ans. Cette phase, qui doit peu à peu disparaitre, peut resurgir à l’adolescence. En quête d’identité, l’adolescent accorde généralement une importance surdimensionnée au regard de l’autre, ce qui l’amène à être particulièrement centré sur sa « petite » personne. Un adulte équilibré et mature devrait avoir réussi à se « décentrer » pour s’ouvrir aux autres. Dans le cas contraire, on peut considérer qu’il existe une anomalie dans le développement de l’individu. Or, cela peut engendrer de graves tensions dans ses relations sociales et affectives. Il est très probable que les proches, famille ou amis finissent par s’éloigner, ne pouvant plus supporter cette relation à « sens unique ». Comme le souligne Christine Calonne, psychologue et psychothérapeute, « l'entourage a le sentiment de ne pas exister, de ne pas compter. Ses difficultés, ses doutes, ses besoins, ses soucis, ses rêves, ses projets semblent ne pas avoir de valeur ». En revanche, les autres doivent se montrer toujours disponible pour elle, ce qui finit par les épuiser émotionnellement.

 

Comment lutter contre l'égocentrisme ?

L’éloignement de l’entourage peut heureusement être salutaire. Il peut faire réagir l’égocentrique qui décidera d’entamer un travail sur lui-même. La psychothérapie est dans ce cas tout à fait recommandée. Elle pousse en effet à se poser les bonnes questions : « Pourquoi ramène-je tout à moi ? » ; « pourquoi le regard de l’autre est-il si important » ? Si vous prenez conscience de votre égocentrisme, vous pouvez vous imposer des petits exercices quotidiens. Étudiez la façon dont vous interagissez avec votre entourage et lancez-vous des défis : « Ce soir je m’oblige à écouter plus qu’à parler », « je ne parlerai que si on me demande mon avis », ou encore « je commence par demander des nouvelles de mon interlocuteur et m’efforce de ne pas penser à mes propos avant qu’il ait fini ». Si vous êtes en couple, demandez à votre conjoint d‘être attentif et de vous interpeller lorsque vous n’êtes pas dans l’écoute. Essayez d’autre part de vous mettre à la place des autres. En ramenant toujours les sujets à vous, pensez-vous que vos interlocuteurs puissent vous considérer comme un ami véritable ? Ils vous voient sans doute davantage comme un opportuniste sans aucune empathie… Si vous êtes le conjoint d’un égocentrique, il est conseillé de ne pas le brusquer. De le rassurer tout en l’interrogeant régulièrement sur ses émotions car il a tendance à faire l’autruche pour ne pas être confronté à sa vulnérabilité. N’hésitez pas non plus à prendre vraiment votre place, défendre vos positions et à lui faire remarquer avec tact quand il dépasse les limites.

Avez-vous des personnes égocentriques dans votre entourage, ou partagez-vous / avez-vous partagé la vie d’un(e) égocentrique ? Avez-vous su poser des limites ? Vos témoignages nous intéressent !

 

Photo © Adobe – Auteur : Jin Kansa

charlotte4575, 12/19/2024